top of page

Prix Science 2022 : pourquoi certains patients meurent du Covid-19 et d'autres non

  • Writer: cardio du viaduc
    cardio du viaduc
  • Feb 25, 2022
  • 4 min read

Par Coralie Lemke le 24.02.2022 à 20h00 Lecture 5 min. Une équipe française a réussi à identifier plusieurs causes qui expliquent pourquoi des personnes jeunes et saines peuvent décéder du Covid-19. Des travaux pour lesquels le médecin et chercheur Paul Bastard vient de recevoir le Prix Science 2022.

L'équipe dont fait partie Paul Bastard a voulu comprendre pourquoi certains patients ont moins de chances face au Covid-19 que d'autres. ANTONIN BURAT / HANS LUCAS / HANS LUCAS VIA AFP Pourquoi meurt-on du Covid-19? Pourquoi certaines personnes jeunes et sans comorbidités décèdent-elles de la maladie alors que d'autres, plus âgées, survivent ? C'est à ces ambitieuses questions que le médecin et chercheur français, Paul Bastard, a voulu essayer de répondre. Ce pédiatre, membre du laboratoire de recherche Imagine à Paris, a participé à deux études majeures publiées dans Science, qui montrent que 15% des formes graves de Covid-19 s'expliquent en fait par la génétique. 22 variants touchant 8 gènes différents ont un effet délétère sur la réponse du système immunitaire contre le Covid-19. Des travaux qui lui valent aujourd'hui le Prix Science for Immunology 2022. Interview. Sciences et Avenir : "Pourquoi meurt-on du Covid-19?", en voilà une vaste question à laquelle vous avez voulu répondre. Pourquoi avez-vous décidé de vous attaquer à ce sujet ? Paul Bastard : Lorsque la pandémie a démarré, je travaillais en tant qu'interne dans les hôpitaux de Paris. Rapidement, il a fallu répondre à l'afflux de patients infectés par le Covid-19. Ma femme travaillait alors à l'hôpital Lariboisière, qui avait besoin de renfort et où je suis venu comme beaucoup d'autres prêter main forte. On s'est retrouvés face à un nouveau type de patients, sans comprendre pourquoi certains faisaient des formes graves et en mourraient alors qu'il n'avait pas de comorbidités comme le diabète ou l'obésité. Comment avez-vous lancé vos recherches ? J'étais à l'époque en train de faire une thèse de sciences - en parallèle de mes études en médecine - à l'Institut Imagine avec les Prs Jean-Laurent Casanova et Laurent Abel de l'Institut Imagine à Paris (hôpital Necker-Enfants malades, AP-HP). J'essayais de comprendre pourquoi certaines infections étaient plus graves chez certains que chez d'autres. Je travaillais déjà depuis deux ans sur les prédispositions génétiques aux infections virales sévères, qui touchent souvent des enfants. Atteints de défauts génétiques, ils n'arrivent pas à se défendre face à certaines infections. Nous avons alors choisi de poser la même question pour le Covid-19. A l'époque, la France entre en confinement et se met brusquement à l'arrêt. Quelles solutions avez-vous trouvées pour mener vos travaux ? Nous étions en plein confinement, tout était fermé. Jean-Laurent Casanova avait lancé un consortium pour recruter des patients mais aucun transporteur d'échantillons n'était disponible. C'est donc moi qui suis allé d'hôpital en hôpital à vélo, dans les services de réanimation de Paris et de la proche banlieue pour récupérer les échantillons sanguins. Je les rangeais dans des boîtes spéciales dans mon sac à dos et je traversais un Paris désert sur mon deux-roues. Une fois arrivées au laboratoire, il fallait extraire l'ADN des échantillons, puis le séquencer. Nous avons entamé ces travaux en faisant participer des médecins dans plus de 40 pays avec des cohortes énormes. Sans eux, rien de tout cela n'aurait été possible. Jean-Laurent Casanova de l'Institut Imagine et de la Rockefeller University lance alors le COVID Human Genetic Effort (CHGE) ainsi qu'une collaboration avec le Howard Hughes Medical Institute de New York pour exploiter ces analyses ADN. Qu'avez-vous pu observer sur ces échantillons ? Nous avons d'abord constitué une cohorte avec des patients très sévères en réanimation et les avons comparée à un groupe de patients qui n'avaient soit aucun symptôme, soit une forme légère sans signes respiratoires. Après avoir séquencé les 20.000 gènes présents dans l'ADN, nous avons essayé de voir s'il existait des mutations délétères dans les gènes connus pour contrôler les interférons de type 1. Et bingo, c'était le cas : entre 1 et 3%. Nous avons alors voulu voir si des auto-anticorps (des anticorps qui s'attaquent aux propres cellules de l'organisme d'un individu, ndlr) pouvaient peut-être bloquer les interférons de type 1 et effectivement, c'était le cas. Un paramètre silencieux qui entraîne une réplication virale très élevée et qui amenait tout un tas de patients à mourir en réanimation. Vous avez aussi fait des observations génétiques. Oui, sur le versant génétique, on s'est aperçus que 15% des personnes en réanimation étaient porteurs de ces mutations. Après avoir testé 34.000 personnes de la population générale avec des échantillons datant de 2007, donc bien avant le Covid-19, nous avons remarqué que la prévalence des auto-anticorps augmente avec l'âge, ce qui explique en partie l'augmentation du risque chez les personnes âgées. Réalisée à temps, l'analyse sanguine pourrait donc sauver des vies ? En effet, c'est très facile de détecter ces auto-anticorps. L'idée est de réaliser le test soit avant d'être infecté, soit au début de l'infection afin de donner des traitements à temps. En amont, il existe non seulement la vaccination mais aussi des traitements à base d'anticorps monoclonaux qui peuvent diminuer la charge virale. De nouvelles molécules sont également en train d'être mises au point. Et si la personne est déjà en réanimation quand le test est réalisé, on peut envisager de supprimer ces auto-anticorps grâce à différentes techniques en extrême urgence. Tout ceci fait gagner des chances de survie aux patients. Ce test est maintenant disponible et utilisé à travers le monde. Comment fonctionne-t-il ? C'est un test qui peut être réalisé par tous les hôpitaux. Il s'agit d'un simple test Elisa, qui permet de détecter si la personne possède des auto-anticorps qui vont la fragiliser face au virus du Covid-19. Dans la cohorte utilisée pour notre étude, environ 20% des gens décédés présentaient ces auto-anticorps. Quand on sait que le Covid a fait entre 4 et 10 millions de morts, cela représente entre 1 et 2 millions de personnes présentant ce variant génétique. Aujourd'hui, la Pitié-Salpêtrière mais aussi l'hôpital Bichat, les Hospices Civils de Lyon mais aussi certains laboratoires aux Etats-Unis. La recherche sur les interférons se poursuit-elle toujours ? Je suis depuis redevenu interne en pédiatrie à l'hôpital Necker et je continue en effet de travailler sur les anticorps au laboratoire sur mon temps libre. Mon internat se termine bientôt et j'irai ensuite exercer au service d'immunologie pédiatrique à l'hôpital Necker à Paris.

Comments


Formulaire d'abonnement

Merci pour votre envoi !

0565690501

©2021 by CABINET DE CARDIOLOGIE. Proudly created with Wix.com

bottom of page