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RÉGIME MÉDITERRANÉEN : UN MODÈLE D’ALIMENTATION SANTÉ

RÉGIME MÉDITERRANÉEN : UN MODÈLE D’ALIMENTATION SANTÉ Par Jean-Louis Schlienger - date de publication : 02 septembre 2021 Il est aujourd'hui démontré que le régime méditerranéen est associé à une baisse de la mortalité et de la morbidité et à une moindre incidence des maladies cardio-métaboliques. Facile à adapter au quotidien, il s'inscrit parfaitement dans les recommandations de santé publique.


Une alimentation qui s'intègre dans un art de vivre (illustration). Résumé : Le régime méditerranéen (RM) regroupe un ensemble de pratiques, de traditions et de savoir-faire représentatifs de l'espace méditerranéen, dont les ingrédients de base étaient originellement le pain, l'huile d'olive et le vin. Ce n'est pas un « régime » comme les autres, mais plutôt une façon de s'alimenter puisqu'il n'est pas fondé sur la restriction volontaire. Il s'intègre dans un art de vivre où la sieste et le soleil ont leur part et est aussi l'expression d'une culture. C'est donc d'alimentation méditerranéenne qu'il sera question ici plutôt que de régime au sens commun du terme. Répandu sur les deux rives de la Méditerranée avec des particularités loco-régionales, le RM où dominent l'huile d'olive, les fruits et légumes, les produits céréaliers et les légumes secs avec une place limitée des produits d'origine animale, est considéré par nombre de nutritionnistes comme l'alimentation idéale en termes de longévité et de santé. Ce mode alimentaire doit-il et peut-il supplanter les régimes occidentaux tenus pour responsables d'un surrisque cardio-métabolique et de cancer ? S'agit-il d'un concept idéaliste ou d'une option diététique validée par les études épidémiologiques convaincantes sans être formelles et, depuis peu, par des études d'intervention ? La Grèce Antique est le berceau de la tradition alimentaire méditerranéenne, marquée à la fois par la triade du pain, de l'olivier et de la vigne et par une culture du partage et de la commensalité. Ce modèle alimentaire a été adopté par les Romains qui l'ont diffusé à une grande partie de leur Empire, avant qu'il ne replonge dans l'anonymat. C'est à des épidémiologistes américains, notamment Ancel Keys, que l'on doit sa redécouverte, au milieu du XXe siècle. Leurs études ont permis d'établir une relation robuste entre l'alimentation et la mortalité coronarienne et, au-delà, la longévité. En 1956, Ancel Keys lance la fameuse Seven Countries Study qui confronte des pays méditerranéens à des pays payant un lourd tribut aux maladies coronariennes et dont le mode de vie est radicalement différent, dans le but de démontrer le rôle de l'alimentation et du style de vie dans la survenue des maladies coronariennes. C'est ainsi qu'ont été découverts les bienfaits de ce qu'on appelait alors le régime crétois ou la « diète » méditerranéenne et, surtout, l'importance des apports alimentaires en acides gras comme régulateurs de la cholestérolémie et comme facteurs facilitateurs ou protecteurs dans la survenue des maladies coronariennes (1). Quelques décennies plus tard, les effets bénéfiques sur les dyslipidémies et les maladies coronariennes des acides gras mono-insaturés, dont l'huile d'olive, corps gras emblématique du monde méditerranéen, est un gros pourvoyeur sous la forme d'acide oléique, sont formellement démontrés (2). Soutenue par les résultats de plusieurs études, l'alimentation méditerranéenne est devenue une panacée diététique médiatisée sous le terme de régime crétois. Les bases du régime méditerranéen Née dans des pays pauvres, l'alimentation méditerranéenne est diversifiée mais frugale. Utilisant les ressources et ingrédients disponibles localement, elle n'est pas identique sur tout le pourtour méditerranéen bien qu'ayant un socle commun composé d'aliments peu transformés et donc peu raffinés. Les céréales constituent l'essentiel de l'apport énergétique. Le blé est largement présent sous forme de pain avec ou sans levain (pain azyme), de galettes et de semoule de blé dur. Les légumineuses ont une place de choix : pois chiches, fèves, haricots et lentilles. Les légumes et les fruits frais ou non comme les dattes et les figues, sont omniprésents. Les graines, les noix et les oléagineux comme les amandes sont également prisés. Les produits d'origine animale - mouton, agneau, volaille, bœuf, poissons, œufs et porc en l'absence d'interdits religieux - sont consommés quotidiennement en quantités modérées. Les produits laitiers de vache, chèvre ou brebis selon les régions, ont une place modeste. Les mets sucrés sont très présents au dessert. Les épices, les aromates et les herbes sont largement utilisés. Le vin ou le thé sont les boissons de référence selon les régions et les cultures. L'huile d'olive est incontestablement l'aliment vedette utilisé abondamment dans les préparations crues ou cuites. Ainsi le fameux régime crétois, n'est-il qu'une déclinaison parmi d'autres de ce mode alimentaire. La consommation de pourpier, d'escargots et la frugalité en font la singularité, mais n'apportent rien à l'intérêt nutritionnel global. Pas plus que l'houmous au Liban, le pain azyme en Egypte ou l'huile d'argan au Maroc. Un profil nutritionnel à l'opposé de celui de l'alimentation occidentale Nombre des ingrédients prônés par les nutritionnistes, qui ont souvent tendance à s'appesantir davantage sur les vertus des nutriments et micronutriments que sur celles des aliments, sont présents. Sans entrer dans les subtilités biochimiques, il y a lieu de relever :

  • l'apport important en acides gras monoinsaturés sous forme d'huile d'olive ;

  • l'équilibre remarquable entre les acides gras polyinsaturés de la série n-6 (acide linoléique) et de la série n-3 dits « oméga-3 » (acide alpha-linolénique) ;

  • l'apport réduit en acides gras saturés d'origine animale ;

  • la dotation importante en glucides complexes ;

  • la haute teneur en fibres ;

  • la richesse en microconstituants grâce aux fruits et légumes, au vin et à l'huile d'olive où dominent les polyphénols ;

  • la faible densité énergétique (apport calorique pour 100 grammes d'aliments) et la haute densité nutritionnelle (apport en vitamines, oligo-éléments et microconstituants pour 100 grammes d'aliments).

L'ensemble réalise un profil presque en tout point opposé à celui de l'alimentation occidentale trop énergétique, dominée par les graisses saturées et les sucres simples, pauvre en fibres, peu diversifiée avec une faible densité nutritionnelle. Des bénéfices pour la santé bien démontrés Les bénéfices de l'alimentation méditerranéenne sont établis sur la base de résultats concordants d'études épidémiologiques dans de nombreux domaines. Le style alimentaire méditerranéen est associé à une diminution de la morbidité globale et de la mortalité toutes causes et aussi à une moindre incidence des principales maladies chroniques : maladies cardiovasculaires, hypertension artérielle, obésité, syndrome métabolique, diabète de type 2, certains cancers, ostéoporose et même le déclin cognitif lié à l'âge (3). L'étude d'intervention PREvención con DIeta MEDiterránea (PREDIMED), un essai randomisé comparant, dans une importante cohorte espagnole, un régime enrichi en huile d'olive à un régime conventionnel, a confirmé ses bienfaits cardiométaboliques (4). Ils sont particulièrement nets chez les sujets diabétiques qui composaient la moitié de la cohorte. À un effet favorable sur l'homéostasie glucosée, s'ajoutent l'amélioration des facteurs de risque cardiovasculaire - HTA, lipides, poids - et la diminution de la mortalité (5). Le RM est également associé à la prévention du diabète et de la stéatose hépatique (6). Les méta-analyses et revues systématiques ont confirmé le rôle bénéfique tout particulier du RM dans la prévention du diabète et de ses complications (7, 8, 9). Les mécanismes présumés Faut-il attribuer les bienfaits du RM à certains nutriments ou aliments spécifiques ou au modèle alimentaire dans sa globalité et, peut-être au style de vie qui lui est associé ? Il est bien difficile de faire la part des choses face à la multiplicité des facteurs nutritionnels en cause. Le RM propose une alimentation antioxydante, anti-inflammatoire, antithrombogène qui améliore l'insulinorésistance, la dysfonction endothéliale, le profil lipidique et s'oppose au raccourcissement des télomères associés à la longévité. Cela est dû, d'une part à la haute densité nutritionnelle qui témoigne de l'apport en vitamines, oligo-éléments et des polyphénols contenus dans l'huile d'olive, le vin, le thé, les graines, noix et les fruits et légumes et, d'autre part, à la faible densité énergétique favorisée par la consommation de fruits et légumes et de céréales complètes. La dotation importante en acides gras mono-insaturés (huile d'olive) et en acides gras oméga 3 (pourpier, escargots, noix, graines, poisson), l'index glycémique bas des légumes secs et des céréales complètes, une relative frugalité et l'abondance en fibres qui impactent favorablement le microbiote sont autant de facteurs favorables susceptibles de réduire l'incidence des maladies chroniques et d'en améliorer l'évolution lorsqu'elles sont présentes. En pratique, comment adopter un régime méditerranéen ? L'utilisation de l'huile d'olive en lieu et place des graisses concrètes (huile de palme) et du beurre, la place considérable faite aux fruits et légumes et aux céréales brutes, la consommation modérée de viande et charcuterie sont les fondements de ce « régime » qu'il est assez facile d'adapter pour en faire une alimentation de base au quotidien. Point n'est besoin de recourir aux aliments soi-disant emblématiques comme le pourpier, les escargots, le pain azyme, le thé ou le vin. Il suffit de composer un repas diversifié écartant le plus possible les aliments transformés, les sucres simples et les graisses animales et renforçant la place des fruits et légumes (5 fruits et légumes par jour) pour s'en rapprocher et profiter de ses vertus préventives. C'est un régime tout à la fois d'équilibre, de raison et de saveur dont rend compte une pyramide alimentaire (Figure 1).


Figure 1 - La pyramide alimentaire représentant la hiérarchisation des classes alimentaires des régimes méditerranéens (adaptée de 10) Conclusions Le régime méditerranéen n'est pas une utopie nutritionnelle, mais bien un modèle alimentaire aux vertus « santé » autant préventives que thérapeutiques fondées sur les preuves. Proche de nos racines culturelles latines, exportable au quotidien, il peut être adapté aux ressources locales et répond aux aspirations de l'alimentation moderne : authenticité, respect de l'écologie, diversité, tout en étant riche en saveurs et onctueux, pauvre en graisses saturées et en sucres simples. Sa mise en œuvre corrige les dérives de l'alimentation occidentale responsable de nombre de maladies chroniques et permet d'éviter les régimes conventionnels et leur habituel cortège de restrictions et d'interdits. Agréé par l'OMS pour son exemplarité, le RM s'inscrit parfaitement dans les recommandations de santé publique (Programme National Nutrition Santé [PNNS]). C'est également un merveilleux outil diététique dans de nombreuses pathologies - surpoids, dyslipidémie, syndrome métabolique, diabète de type 2, maladies ischémiques du cœur – où il est d'usage de prescrire des régimes restrictifs contraignants, difficiles à respecter. ©vidal.fr Pour en savoir plus 1- Keys A, Menotti A, Karvonen MJ, et al. The diet and 15-year death rate in the seven countries study. Am J Epidemiol 1986 ; 124: 903-915. 2- Grundy SM. What is the desirable ratio of saturated, polyunsaturated, and monounsaturated fatty acids in the diet? Am J Clin Nutr 1997; 66(Suppl.) : 988-990. 3- Woodside JV, Gallagher NE, Neville CE et al. Mediterranean diet interventions to prevent cognitive decline--opportunities and challenges. Eur J Clin Nutr 2014 ; 68 : 1241-1244. 4- Estruch R, Ros E, Sala-Salvadó J, et al PREDIMED Study Investigators. Primary prevention of cardiovascular disease with a Mediterranean diet supplemented with a mediterranean diet supplemented with extra-virgin olive oil or nuts. N Engl J Med 2018 ; 368 : e34. 5- Elhayany A, Lustman A, Abel R, et al. A low carbohydrate Mediterranean diet Improves cardiovascular risk factors and diabetes control among overweight patients with type 2 diabetes mellitus: a 1-year prospective randomized intervention study. Diabetes Obes Metab 2010 ; 12 : 204-209. 6- Anania C, Perla FM, Olivero F, et al. Mediterranean diet and nonalcoholic fatty liver disease. World J Gastroenterol 2018 ; 24 : 2083-2094. 7- Huo R, Du T, Xu Y, et al. Effects of Mediterranean-style diet on glycemic control, weight loss and cardiovascular risk factors among type 2 diabetes individuals: a meta-analysis. Eur J Clin Nutr 2015 ; 69 : 1200-1208. 8- Martín-Peláez, S, Fito M, Castaner O. Mediterranean Diet Effects on Type 2 Diabetes Prevention, Disease Progression, and Related Mechanisms. A Review. Nutrients 2020, 12, 2236. 9- Sleiman D, Al-Badri MR, Azar ST. Effect of Mediterranean diet in diabetes control and cardiovascular risk modification : A systematic review. Front. Public Health 2015 ; 3 : 69. 10- Willett WC, Sacks F, Trichopoulou A, et al. Mediterranean diet pyramid: a cultural model for healthy eating. Am J Clin Nutr 1995; 61:1402S-1406S. Cet article d'actualité rédigé par un journaliste scientifique reflète l'état des connaissances sur le sujet traité à la date de sa publication. Il ne s'agit pas d'une page encyclopédique régulièrement remise à jour. L'évolution ultérieure des connaissances scientifiques peut le rendre en tout ou partie caduc. Sources : VIDAL JEAN-LOUIS SCHLIENGERProfesseur honoraire, ancien chef du service de médecine interne et nutrition au CHU de Strasbourg. Faculté de Médecine - Université de Strasbourg.

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